samedi, juillet 27, 2019

Saturne, Ketu et le sentier philosophique


« Saturne et Ketu se dirigent  dans la même direction, inspirant un travail subtil, discret, profond qui prend en compte leurs tendances authentiques à la simplicité. Ils sont des indicateurs de sagesse et de quête spirituelle. Leur rencontre est à même de nous enseigner la tempérance, la profondeur et la richesse des réflexions et en fin de compte de nous aider à conquérir le silence mental, clef de notre bonheur et de la guérison du monde.  » Ketu, Saturne et Pluton en Capricorne, une bataille décisive 

Au-delà des considérations abordées dans l’article cité ci-dessus (1), la très signifiante conjonction Ketu- Saturne, active jusqu’à la mi-novembre, définit clairement un point de vue de philosophie astrologique.

Renonciation et détachement

Si Ketu (la queue du dragon c'est-à-dire le noeud lunaire sud), montre souvent dans ses compulsions et ses brusqueries (2) des similitudes avec Mars ou Uranus, philosophiquement parlant, il est extrêmement proche de Saturne dans ses significations et ses effets. Tous deux gravitent d'ailleurs autour des mots-clefs renonciation (Saturne) et détachement (Ketu).

Nous parlons donc philosophie : Saturne s’associe souvent à la misère, à l’isolement, à la tragédie et aux épreuves de la vie, mais il est aussi « Celui qui purifie » car sa nature force à la réflexion  et à la spiritualité. Il est le Sage, l’Ancien qui favorise la maîtrise de soi et l’austérité afin de nous élever vers des cieux plus raréfiés. Pas de patience, de méditation, de yoga, de végétarisme, de jeûnes, de promenades ou de retraites solitaires sans Saturne. 

Ketu quant à lui s’associe également aux épreuves : les siennes naissent de craintes inexplicables, de compulsions irrésistibles ou de la douleur physique. Il prive des bienfaits matériels et sociaux, d’où sa réputation de « maléfique ». Sa nature est pourtant spirituelle, associé à la quête de l’immortalité et vouant celles et ceux qu’il marque de son sceau à la simplicité et à l’austérité, de façon parfois compulsive il est vrai, s’il n’est pas correctement intégré.

Le moi

Ces survols rapides de Saturne et de Ketu sont à inclure dans un tout cohérent, dans lequel tous les éléments astrologiques (astres, Angles, noeuds lunaires et ainsi de suite) s'insèrent dans cette fresque immensément complexe qui fait sens et que nous appelons la vie. 

La question à poser est : de quoi Saturne et Ketu tentent-ils de nous éloigner, que ce soit par la renonciation ou le détachement? De l’argent, du luxe, du sexe, du pouvoir ou de la célébrité, c'est-à-dire de ces expressions diverses de nos natures grégaires, tournées vers le plaisir et la compétition ? Cette fragmentation de nos désirs a-t-elle un sens? L'on sait que nombre de professionnels de l’austérité, soient-ils pasteurs, mollahs, prêtres ou encore méditants vêtus de robes oranges sont souvent de pieux hypocrites : les signes extérieurs de simplicité, de pauvreté ou de chasteté ne signifient rien, sinon que l’on n’a pas encore commencé à gratter l’écorce de la vérité.

La philosophie de Saturne, comme celle des Noeuds lunaires - car Ketu ne peut être compris sans Rahu - mène à une même destination, traditionnellement appelée sagesse, libération ou illumination. De quelle façon? En renonçant (Saturne) au moi. En se détachant (Ketu) du moi.

Rahu et l’attachement 

Rahu (la tête du dragon c'est-à-dire le noeud lunaire nord), d’une façon trop longue à expliquer dans le cadre d’un court article, participe de façon essentielle à la génération du moi, à son existence et à son épaississement. Il représente l'attachement que nous portons à notre passé, à notre identité culturelle et sociale, à notre personnalité singulière, à l'image que nous entretenons de nous-même. 

Il figure la recherche insatiable des expériences ainsi que ce qu’elles provoquent : crainte de ne pas obtenir ce que l’on veut, peur de perdre ce que l’on a, anxiété, colère, arrières-pensées, manoeuvres secrètes, attachement et insatisfaction. Voilà pourquoi l’on parle de cadeaux empoisonnés à son sujet.

Toutes les « techniques » spirituelles, prières, méditations, répétitions de mantras, austérités, jeûnes et ainsi de suite ne poursuivent qu’un but : alléger ou dissoudre ce moi, cet ego limité et bavard, afin que la conscience profonde, l’âme si l’on veut, ou l’atman, se dégage de la gangue de la matière, de l’espace et du temps et rejoigne l’absolu. Qu’on appelle cet absolu Intelligence, Dieu, Yahvé, Allah, Shiva, Brahman, Grand Esprit ou encore Ordre implié ou Réalité sous-jacente n’a strictement aucune importance. 

Le moi appartient corps et âme à Rahu, intimement lié aux mémoires cristallisées, à leurs matérialisations, ainsi qu'à la génération des pensées captives du temps, tournées vers le passé ou l’avenir et incapables d’appréhender l’ici et le maintenant. Ainsi c'est Rahu, l'attachement, que Ketu et Saturne cherchent à endiguer et à comprendre. 


Ketu et le détachement

Dans ce schéma, Ketu s’associe au sentier spirituel du thème, celui qui révèle la finalité de l'existence, offrant un sens aux épreuves, aux peines comme aux joies et à la vie elle-même. 

Il représente un noyau vital dont la fonction est d’extraire ce sens, une fois les illusions du désir et des expériences (Rahu) arrivées à leur terme naturel qui est l’insatisfaction. Voilà pourquoi il représente le détachement : son éloignement, son rejet des expériences parfois, n’a rien de religieux, de moral ou d’utilitaire. Il est un aboutissement naturel de l’intelligence en quête de sérénité.

Ketu tire les leçons des expériences de Rahu, ainsi que de ses propres défauts qui sont la compulsion et l’avidité spirituelle. Il tente  de comprendre les mystères de nos vies par le biais du détachement de soi. 

Mais rien ne sert de se détacher de tel ou tel élément en particulier enseigne-t-il, que ce soit de l’argent ou de la sexualité par exemple : il faut se rendre directement à la source de tous les attachements qui est le moi. Si cela n’est pas compris, les disciplines, les rituels, les sacrifices, les entrainements et les austérités ne sont rien d’autres que des agitations mentales supplémentaires. Celles-ci appartiennent à Rahu, car elles entrent dans le champ des expériences que la pensée convoite et dirige. 

Ketu enseigne ainsi, forcément, à se détacher de la quête de la libération elle-même. Il symbolise le détachement complet et total du moi. Il figure alors en conséquence les synchronicités (3) et les possibles révélations qu'une telle attitude génère et qui éclairent l’accès « au joyau dans le coeur du lotus ». 

Saturne et la renonciation

Au coeur de ce système, Saturne représente la réflexion profonde, la patience, la détermination, la force mentale et la persévérance qui nous aident à comprendre et à méditer sur le sens de nos existences. 

Sa part la plus difficile, qui lui gagna le surnom de « Grande maléfique », nourrit l’insatisfaction : Saturne fruste, écarte, retarde, interdit et chagrine. Mais en tant que maître de la discipline (non-conflictuelle), de la force mentale, en tant qu'initiateur de la sagesse et de la renonciation (qui n’est pas résignation),  il désamorce la volonté de l’ego à réaliser continuellement ses désirs insatiables (Rahu). A travers lui nous comprenons que la simplicité ne génère pas de craintes. 

Saturne « Celui qui purifie », force ainsi le basculement entre l’attachement (Rahu) et le détachement (Ketu).

De cette façon, considéré comme le socle de la spiritualité, il peut-être qualifié de bénéfique, ce qui est également vrai pour Ketu. Bien compris et vécus ni l'un ni l'autre n’apporteront luxe et richesses, trop porteuses d’énergies négatives, mais ils mèneront la conscience à son but, à ce trésor intérieur que le moi, constitué d'illusion et de matière est incapable d’approcher. 

L’actualité et la philosophie astrologique

Ainsi, jusqu’à la mi-novembre de cette année, la conjonction Saturne-Ketu ouvre en grand certains portails philosophiques. La géométrie céleste est favorable à cet éveil, quoique nombreux soient les écueils disséminés sur le sentier de la lumière : nous sommes captifs de nos attachements et en payons les conséquences (cf. note 1). 


Cette configuration particulière montre que l’attachement (Rahu) et le détachement (Ketu), sont les moteurs principaux du moi, de sa nature complexe et  difficile et au-delà de la quête de l’immortalité. Elle souligne également combien la situation dramatique de notre planète est liée à Rahu qui régit le psychisme de milliards d’êtres humains, matérialisant l'attachement, l'anxiété et l'insatisfaction en guerres, en destruction de l’environnement et en sixième extinction de masse.

Certes, tous les astres sont importants : le ciel est une partition complexe où chaque instrument a sa place. Dans cette symphonie Jupiter joue la part des opportunités et de l’expansion de la conscience. Vénus de l’amour et de la beauté sans lesquels il n’y a pas de joie. Mars de l’action juste et de la bravoure qui permet d’affronter la peur. Uranus des intuitions fulgurantes qui font saisir la vérité que Mercure explique et transmet. Le Soleil de la quête des idéaux alors que la Lune le nourrit et le protège. Neptune de la fusion et de la communion avec les cieux et avec la conscience collective et Pluton de la guérison des traumatismes et de la régénération.  

Alors, avant que Ketu et Saturne ne se séparent, il est fortement conseillé de profiter de leurs enseignements, c’est-à-dire de laisser leurs significations spirituelles imbiber nos coeurs et nos esprits : non seulement parce qu’ils éclairent la finalité de nos existences, mais parce que l’éveil qu’ils proposent est sans doute la seule et unique façon de changer radicalement notre monde avant qu’il ne soit trop tard. 


    (1) Extrait : Ketu et Saturne en conjonction : de début mars à la mi-novembre 2019: « Tendance renforcée au détachement et à la renonciation. Favorable à condition de s’orienter vers la simplicité et la spiritualité. L’acceptation, la patience, la détermination et la persévérance sont à développer sous peine d’adversité. La destinée souffre de secrets de famille, d’absences, de séparations douloureuses, d’abandon, d’éloignement, de froideur, d’indifférence ou d’étouffement  (…..) » (L'astrologie et la mécanique de la pensée)

«  Confronté à Ketu, Saturne cristallise des mémoires difficiles, honteuses ou douloureuses souvent transformées en secrets. Des blocages mentaux, des souvenirs figés, la crainte de révélations empoisonnent la conscience et la destinée. Les secrets liés à cette conjonction provoquent des comportements moraux hypocrites, dissimulant des compulsions susceptibles d’exploser lorsque la tension se fait trop puissante. La libération du poids des secrets nécessite de les désamorcer, de ne plus leur accorder d’importance, mais la nature saturnienne s’y accroche, le « moi » s’étant bâti autour d’eux. La solution consiste à « purifier » Ketu dans un vrai détachement du moi captif de ses mémoires.
Il est nécessaire d’user d’une discipline naturelle, non-conflictuelle, pour éviter que la conscience ne se durcisse dans des compulsions d’austérité ou de chasteté inspirées de conditionnements religieux, de craintes de la punition, du péché ou du mauvais karma. Le danger est de voir l’ambition et l’avidité se dissimuler et se durcir. Sous des masques de simplicité ou de renoncement, elles se manifestent dans le contrôle de soi précaire et malsain, la dureté mentale, l’enrichissement, la domination morale et le pouvoir.


(2) Cf. Les fêtes à l'ombre de  Mars et de Ketu qui évoquent la violence et le terrorisme qui leur sont imputés. 

(3) Les noeuds lunaires se montrent très présents dans les thèmes de synchronicités (les coïncidences signifiantes selon la définition de Jung et de Pauli). Voir à ce sujet L'astrologie et la mécanique de la pensée (Chap. 1, L'astrologie et la pensée - Synchronicité)







CENTILOQUE

CLIQUEZ SUR LE LIEN pour une version entièrement retravaillée du CENTILOQUE, un ouvrage publié en 1993 aux Editions Dervy


Extrait :


1- N°5 : caractère et destinée.


« L’astrologie dévoile les relations intimes qu’entretient le caractère avec la destinée. La destinée d’un individu est l’expression de son caractère ».


Le mot caractère nous vient du grec « kharaktêr », qui signifie un signe gravé. Il signifie également ce qui est propre à une chose, son expression personnelle, son originalité. Par extension, le caractère définit l’ensemble des traits psychiques propres à un individu.


Le caractère se rapporte à la fois à l’expression originale d’un individu et à son thème astral, le signe gravé dans les cieux, qui nous représente et nous définit.


Le caractère est au départ cette infime portion de nos êtres, qui échappe au grand nivellement imposé par l’hérédité et par l’environnement de naissance (racial, familial, social et culturel). Il est ce qui nous rend unique. Au travers de ce petit germe de liberté, la nature développe en nous, patiemment, l'espritla sagesse, le pouvoir et l’amour.


Le terme de destinée est aussi riche en enseignements : il est à la racine du mot destination qui signifie le rôle, l’usage.


Le concept de destinée implique une fonction à remplir. Le caractère actualise la destinée, c’est-à-dire le rôle que nous avons à jouer dans cette existence, un rôle qui n’est pas imposé: on continue à confondre astrologie et fatalisme, on fait d’elle le chantre du c’était écrit, comme si sa fonction se bornait à décrire une destinée transformée en fatum, en une fatalité inéluctable à laquelle nul ne pourrait échapper. C’est tout à fait le contraire, puisque l’astrologie n’a de sens que si elle nous permet d’agir sur la destinée.