samedi, mars 31, 2018

Arnaud Beltrame le héros et Nordahl Lelandais l'assassin


La semaine dernière, Arnaud Beltrame qui offrit sa vie pour sauver une innocente, a soudain illuminé la face la plus admirable de l’humanité dans un acte de pur héroïsme. A l’autre bout du spectre, Nordahl Lelandais, assassin d’une gamine et sans doute tueur en série, illustre le visage le plus obscur de cette même humanité. 

Qu’est-ce qui, astrologiquement, fait le héros ou l’assassin? Cette différence est-elle lisible dans la géométrie céleste? Bien des astrologues se sont posés la question en examinant leurs thèmes, tout en réfléchissant peut-être à ses implications philosophiques : si la destinée, matérialisée par nos caractéristiques psychologiques que l’astrologie décrit avec tant de précision s’impose à nous, qu’en est-il de ce libre-arbitre que la plupart des philosophes réfutent, mais que l’astrologiquement correct ne peut s’empêcher de défendre par crainte d’être accusé de déterminisme ?

A mon sens une approche correcte du problème se formule ainsi :  « La réponse à la question du déterminisme est ambiguë. S’il n’est pas irrévocable, peu lui échappent! Pour le dire autrement la liberté s’acquiert, une appropriation rendue possible par la connaissance de soi. L’astrologie devient alors un instrument au service de la conquête du libre-arbitre, qui en ce sens est synonyme de sagesse ». (1) On peut cependant se demander légitimement si la quête même de cette liberté, c’est-à-dire de cet accomplissement intérieur est inscrite dans le thème natal…  Pourquoi certains d’entre nous y consacrent-ils leurs vies quand d’autres n’y songent même jamais? Ce qui nous amène au débat à propos de l’égalité entre les thèmes. 

Le politiquement-astrologiquement correct répondra avec raison, qu’il n’y a pas de « mauvais » thèmes et que nous sommes tous égaux. Mais qu’en est-il de l’expression de nos destinées? Un seul coup d’oeil suffit à l’astrologue chevronné pour reconnaître une destinée problématique, illustrée par Saturne et Mars très tendus, un ascendant durement aspecté, une maison XII surchargée et ainsi de suite, de même que de riches aspects de Jupiter et de Vénus, des luminaires  en « maisons heureuses » et d’autres configurations favorables lui feront conclure à une destinée chanceuse. Certes la majorité des thèmes sont mixtes, laissant ainsi une indéniable latitude à la conquête du libre-arbitre, mais qu’en est-il des extrêmes, des saints et des tortionnaires, des bienfaiteurs de l’humanité et des criminels de guerre …?  

Sans se perdre dans trop de détails examinons nos deux exemples

Arnaud Beltrame 
Le mercredi 18 avril 1973 à 10H40 Etampes (source Marc Brun) 

La vocation de policier est bien représentée par la conjonction de Jupiter (la justice) avec Mars (son bras armé), d’autant que Jupiter maîtrise la VI en Sagittaire (l’emploi) et domine la X en Poissons et en Bélier (la fonction) à égalité avec Mars. Cette configuration en maison VIII (la mort), au carré de la Lune qui domine l’ascendant (le moi, le comportement), est psychologiquement brutale et renvoie à la mort violente. 

La conjonction Jupiter/Mars s’associe à la colère, parfois celle du juste, qui renvoie dans ce thème à d’autres schémas psychologiques moins évidents : Mars est au demi-carré de Mercure (l’impulsivité), maître de la XII (les épreuves, le dissimulé, le sacrifice), où se trouve Saturne (l’isolement, l’obstacle). 

Ce Saturne au parallèle de déclinaison de l’ascendant, évoque aussi le sérieux et la profondeur de la réflexion et de la quête de soi. Il soutient le sens de l’action dans son trigone à Mars et la démarche spirituelle personnelle dans son trigone à Uranus. Son demi-carré à Vénus souligne pourtant des motivations affectives plus secrètes liées au comportement, une crainte de ne pas être aimé, une sensation d’isolement, de solitude qui nourrissent la recherche spirituelle. 

La Lune en Scorpion, maîtresse du comportement, au carré de Jupiter et opposée à Vénus indique une recherche de sécurité affective prononcée, alimentée par un certain désamour de soi, des obscurités mentales et une certaine violence difficiles à accepter, ainsi qu’une fascination pour la mort considérée comme rédemptrice.

Le rôle de Ketu, le noeud lunaire spirituel en maison XII (le voyage intérieur), au parallèle de l’ascendant est majeur. Il décrit une « compulsion spirituelle » s’appuyant sur la notion de détachement de soi, c’est-à-dire la sensation de la non-importance du moi. C’est là une marque de spiritualité, dont la forme religieuse, chrétienne en l’occurrence, n’est qu’une couleur. Ce même Ketu en XII (l’occultisme) témoigne aussi de son engagement dans la franc-maçonnerie. Un ami qui l’a connu plus jeune disait qu’avant sa conversion au christianisme, il parlait déjà de la noblesse d’offrir sa vie. 

Tout se met ainsi en place :  Saturne en XII offre la force mentale et l’abnégation, alors que la conjonction Mars/Jupiter offre la bravoure nécessaire à un tel acte d’héroïsme. En renfort, Uranus s’oppose au Soleil (l’indépendance de la pensée) et s’allie à Mars (la radicalité des actes). Neptune quand à lui, astre de foi et d’identification, situé à 6° de la cuspide de la VI (le service), au sextile de Jupiter (la compassion), ouvre en grand la voie du sacrifice de soi préparé par la tendance au détachement (Ketu)

Le héros est bien présent et c’est aux noeuds lunaires que l’on doit la situation qui lui valut cette mort courageuse : à ce moment précis Ketu transite à 3° de son Mars (2) en VIII (la mort), et Saturne à 3° de son Rahu en VI (l’emploi).


Nordahl Lelandais 
Le vendredi 18 février 1983 à 18h40 Boulogne-Billancourt (source Didier Geslain) 

La notion de l’ascendant, de ses aspects et de son maître, capables de détruire les promesses du thème est particulièrement bien illustrée ici. 
En effet, Mercure, maître de l’AS (Vierge) et ainsi du comportement, est difficilement aspecté:
- Au carré de la Lune : désordre de la pensée, les mémoires (Lune) obscurcissent la raison (Mercure)
- Au carré de Pluton : la ruse de l’intelligence, l’obsession de la survie.
- Au carré de Saturne : orientations nocives de la pensée, mauvais choix, parfois méchanceté et même cruauté, d’autant que Pluton (le pouvoir, la domination, le sadisme) et la Lune (le contenu de la pensée) s’en mêlent. 

Mercure répercute ainsi sur le comportement l’opposition de la Lune à Saturne (insécurités vécues pendant l’enfance, craintes et mémoires figées, froideur et possible indifférence), sur fond de conjonction Saturne/Pluton (lutte acharnée des interdits et des transgressions) et de Lune opposée à Pluton (boucles mentales obsessionnelles liées à l’enfance et à la recherche de sensations intenses). 

On ajoutera son quinconce à Rahu : « Les choix sont axés sur la survie et l’intérêt personnel sans tenir compte de la moralité. la ruse, l’astuce, le secret, l’opportunisme, le mensonge et d’éventuelles manipulations assistent l’accomplissement matériel ». (3)

La Lune et Saturne étant tous deux au parallèle de l’AS, les deux astres corrompent le comportement par le biais de craintes cristallisées, d’obsessions et de transgressions sexuelles attisées par les interdits. La froideur n’est pas natale cependant, Neptune au carré de Vénus indiquant la sensation douloureuse de ne pas être aimé qui construit une carapace en défense contre la souffrance. La conjonction Mars/Vénus indique les désirs sexuels intenses dans lesquels il cherche à assouvir la soif de sensations. 

Le carré Mars/Neptune n’est pas à sous-estimer dans cette structure : « La volonté d’héroïsme se heurte à l’exagération des dangers et à une éventuelle lâcheté, causant honte et culpabilité. (…… ) les manœuvres défensives se changent en agressivité, en témérité, en colère, en réactions violentes, en besoin d’influencer, de dominer et de maîtriser, en armures extérieures et intérieures. La violence envahit l’imaginaire (…) Au pire le danger, la douleur et la brutalité imbibent l’espace personnel »(4)

Terminons par la conjonction de Ketu à Neptune, qui revêt une belle importance dans le cadre des carrés que l’on vient d’expliquer : « …. sensation confuse d’isolement, de séparation ou d’enfermement (…..) Épreuves liées à des ennemis secrets, à des compulsions nocives, à la culpabilité, à la médisance, à la trahison, à la foi et aux croyances collectives, à la confusion des émotions, à l’alcoolisme ou à la toxicomanie. Possible déséquilibre mental, renvoyant quelquefois à la personnalité d’un des parents ». (5)

Libre-arbitre, circonstances et destinées

Dans le cadre de l’événementiel, les noeuds lunaires marquent les lieux où le libre-arbitre est le plus faible, ce qui, ainsi que noté plus haut, ne signifie pas qu’il n’existe pas mais qu’il est à conquérir de haute lutte. 

Ainsi, quand les circonstances se présentent, le caractère et le comportement donnent corps à la destinée. Nous avons déjà vu que lors de l’attentat terroriste et de la mort d’Arnaud Beltrame, Ketu, si important pour lui, à 12°36 du Verseau est conjoint à son Mars à 15°59 de ce signe. Son thème marqué par l’impulsivité, le sens de la justice et de la futilité du moi, lui laisse peu de choix, d’autant que Saturne à 8°35 du Capricorne transite à 3° de son Rahu en VI, impliquant le sacrifice (Saturne en XII au natal) dans le cadre de ses fonctions. La destinée héroïque s’accomplit. 

On remarquera avec intérêt que dans la nuit du 26 au 27 août 2017, date de l’enlèvement de la petite Maëlys par Nordahl Lelandais, Rahu (la quête des expériences, la colère rentrée, l’insatisfaction) est à 23°37 du Lion, exactement conjoint à Mars céleste qui transite sa maison XII (violences dissimulées), en opposition à son Soleil et bien sûr à Ketu conjoint à celui-ci, symbolisant l’obscurcissement de la lumière par le biais de compulsions nocives  … (6)

Dans ces moments clefs de leurs destinées, les deux thèmes subissent des puissants transits des noeuds lunaires impliquant Mars avec des conséquences diamétralement opposées. 

Les deux hommes ne sont bien sûr ni tout blanc ni tout noir. La Lune d’Arnaud Beltrame, tourmentée en Scorpion, au carré de Mars et de Jupiter, n’est pas facile et il en a sans doute souffert. Au sextile de Jupiter et d’Uranus, le Mercure de Nordahl Lelandais indique des possibilités de comportement intelligent, d’expansion de la conscience, de droiture et de révolution intérieure : il pouvait ainsi choisir un autre chemin.

Les deux thèmes sont également alourdis par un Saturne au parallèle de l’AS, impliquant une tendance à la rigidité, à l’étouffement et au contrôle de soi et une même capacité à réfléchir sérieusement au sens de ses actes, à la finalité de sa vie et de sa destinée. Certes le Saturne de Lelandais est « moins bien aspecté » dira-t-on, mais son trigone au Soleil indique une possible orientation lumineuse. 

Le fait est que l’un fut un héros et que l’autre est un assassin, sans doute pervers. La question du libre-arbitre reste entière et la résoudre, si cela est possible, nécessite une approche intelligente de la nature humaine : le moi, le tyran de nos consciences, constitué de cristallisation mentales, d’expériences accumulées et de trop nombreux conditionnements reste plus insondable que les plus lointaines galaxies. Il se tient pourtant au coeur de nos destinées et le bonheur comme le malheur lui appartiennent. Quand aux mystères de nos existences, ils restent inapprochables tant qu’il n’a pas été conquis. Le thème astral natal, qui grave notre identité dans les cieux, nous prouvant ainsi que ceux-ci nous sont moins étrangers qu’il n’y paraît, reste dans tous les cas un instrument merveilleux pour poursuivre cette quête. 



(1) L’astrologie et la mécanique de la pensée . « Craignant le piège du déterminisme, l’astrologie moderne défend pourtant le libre arbitre, alors que bien des écoles de pensée l’ont réfuté, lui opposant par exemple l’ignorance des causes profondes de nos actions (Spinoza), la grâce de Dieu ou plus récemment la puissance de l’inconscient. » 

(2) Voir les articles liant les conjonctions Ketu et Mars aux attentats, entre autres  Le temps du dragon, Mars le Dragon et la barbarie ou encore Les fêtes à l’ombre de Mars et de Ketu

(3) L’astrologie et la mécanique de la pensée Les aspects des noeuds lunaires Rahu en aspect à Mercure

(3) Ibid. Les aspects de Mars, Mars et Neptune en aspects tendus.


(5) Ibid. Les aspects des noeuds lunaires, Ketu et Neptune 

(6) Pour pousser les investigations plus avant, le 12 avril 2017, lorsqu’il assassine le Caporal Arthur Noyer, Rahu transite à 3° de son AS : comportement guidé par des colères secrètes et obsessionnelles, des mémoires figées et une insatisfaction maladive.


CENTILOQUE

CLIQUEZ SUR LE LIEN pour une version entièrement retravaillée du CENTILOQUE, un ouvrage publié en 1993 aux Editions Dervy


Extrait :


1- N°5 : caractère et destinée.


« L’astrologie dévoile les relations intimes qu’entretient le caractère avec la destinée. La destinée d’un individu est l’expression de son caractère ».


Le mot caractère nous vient du grec « kharaktêr », qui signifie un signe gravé. Il signifie également ce qui est propre à une chose, son expression personnelle, son originalité. Par extension, le caractère définit l’ensemble des traits psychiques propres à un individu.


Le caractère se rapporte à la fois à l’expression originale d’un individu et à son thème astral, le signe gravé dans les cieux, qui nous représente et nous définit.


Le caractère est au départ cette infime portion de nos êtres, qui échappe au grand nivellement imposé par l’hérédité et par l’environnement de naissance (racial, familial, social et culturel). Il est ce qui nous rend unique. Au travers de ce petit germe de liberté, la nature développe en nous, patiemment, l'espritla sagesse, le pouvoir et l’amour.


Le terme de destinée est aussi riche en enseignements : il est à la racine du mot destination qui signifie le rôle, l’usage.


Le concept de destinée implique une fonction à remplir. Le caractère actualise la destinée, c’est-à-dire le rôle que nous avons à jouer dans cette existence, un rôle qui n’est pas imposé: on continue à confondre astrologie et fatalisme, on fait d’elle le chantre du c’était écrit, comme si sa fonction se bornait à décrire une destinée transformée en fatum, en une fatalité inéluctable à laquelle nul ne pourrait échapper. C’est tout à fait le contraire, puisque l’astrologie n’a de sens que si elle nous permet d’agir sur la destinée.